Ce qui fait une nation prospère

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Eric Bertinat

La conseillère fédérale Karin Keller-Sutter accompagnée par le sénateur Benedikt Würth (PDC/SG) ont lancé lundi 11 février la campagne des opposants à l’initiative de l’UDC qui veut que la Suisse règle de manière autonome l’immigration, donc sans libre circulation des personnes. Principale argument des deux politiciens : une rupture de cet accord avec l’Union européenne (UE) menacerait la prospérité de la Suisse. Mais de quelle prospérité parle-t-on ? Et l’Eglise catholique, que dit-elle sur ce thème ?

Dans sa célèbre encyclique « Rerum novarum » (1891), Léon XIII rappelle aux chefs d’Etat « l’office de la prudence civile et le devoir propre de tous ceux qui gouverneront. Or, ce qui fait une nation prospère, c’est la probité des mœurs, l’ordre et la moralité comme base de la famille, la pratique de la religion et le respect de la justice, c’est un taux modéré et une répartition équitable des impôts, le progrès de l’industrie et du commerce, une agriculture florissante et autres éléments du même genre, s’il en est que l’on peut développer sans augmenter d’autant le bien-être et le bonheur des citoyens ». Et quelques lignes plus loin, le Pape précise cette évidence : « le gouvernement ne doit pas viser l’intérêt de ceux qui ont le pouvoir entre les mains, mais le bien de ceux qui leur sont soumis ».

Alors, la poursuite de la libre circulation se justifie-t-elle au nom de la prospérité telle que le pape Léon XIII l’a définie ? Est-ce que les promesses de prospérité faites au peuple et rappelées par Mme Karin Keller-Sutter se sont concrétisées depuis l’introduction de la libre circulation, le 1er juin 2002 ?

Les questions touchant à la morale chrétienne et à la famille sont en régression permanente, sans cesse attaquées par une classe politique qui n’a guère conservé l’amour, ou simplement le respect, de la religion. Le progrès de l’industrie et du commerce ne doit rien à la libre circulation et l’agriculture est paralysée par l’impérialisme européen et livré à une concurrence totale des produits européens.

Suite à l’ouverture complète des frontières (2007), nous constatons que le produit intérieur brut (PIB), cet indicateur économique qui permet de mesurer la production économique intérieure réalisée par un pays, n’a pas évolué ces dernières années malgré l’augmentation massive de la population, plus d’un million de personnes se sont installées en Suisse.

Toujours depuis 2007, les exportations suisses dans l’Union européenne ont baissé, le chômage a augmenté.

C’est sans doute ce qui a conduit le peuple suisse à accepter l’initiative de l’UDC contre l’immigration de masse.

Le 17 mai, ne sera pas une votation ordinaire. Elle rappelle par son importance celle de l’adhésion sur l’Espace Economique Européen que les Suisses ont refusé sous les quolibets et les promesses de fin du monde de toute la classe politique. La prospérité est un élément parmi d’autres qui nous aide à nous forger une opinion et l’aide de l’enseignement de l’Eglise catholique est précieuse dans ce choix. Nous reviendrons, toujours sous l’angle du magistère, sur cette votation. Sous l’angle de la souveraineté d’un pays ou sous celui de l’immigration. Comme un avant-goût, nous vous proposons ci-dessous, cette réflexion de saint Thomas d’Aquin sur la globalisation.


Newsletter N° 5 – 15 février 2020  ¦  Source : Perspective catholique


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Eric Bertinat
À la suite de la décision de Mgr Lefebvre de consacrer quatre évêques, Éric Bertinat cofonde, avec ses amis les abbés La Praz et Koller, la revue Controverses (1988-1995). En 2010, il fonde l’association Perspective catholique, engagée sur des questions sociétales en lien avec la doctrine chrétienne. Journaliste et collaborateur régulier de plusieurs publications (Le Vigilant, Présent, Una Voce Helvetica, etc.), il entame également une carrière politique dès 1984. Élu député au Grand Conseil de Genève en 1985 sous la bannière de Vigilance, il y revient en 2005 avec l’UDC et occupe plusieurs postes clés jusqu’en 2013. Il est aussi membre du Conseil municipal de Genève à partir de 2011, où il exerce diverses présidences de commissions jusqu’en 2021. Le 5 juin 2018, il est élu président de ce Conseil pour la période 2018-2019.

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