Abbé Thibault de Maillard (FSSPX) – Le premier critère retenu pour définir un impôt confiscatoire, lors de la promulgation de la loi du bouclier fiscal en janvier 2011 à Genève énonçait cette règle : « l’imposition (y compris l’impôt sur la fortune), ne dépasse pas durablement les revenus (y compris les rendements provenant de la fortune) ». Un principe en plein accord avec la doctrine sociale de l’Église. Réflexion sur l’utilité sociale de la propriété privée.
Motivation pour le travail bien fait
Quand la loi du canton de Genève mentionne le revenu comme référence pour l’impôt, elle énonce un principe de bon sens tout autant qu’une loi de la nature humaine. En effet, l’un des principaux stimulants du travail est l’accession à la propriété qui en découle. Un travail qui débouche sur un salaire indécent n’est pas motivant. Un salaire qui autorise l’épargne pour réaliser quelques beaux investissements stimule la bonne gestion des gains financiers, et un travail sérieux pour conserver son salaire. Il est donc pertinent de proportionner la taxation au salaire, afin de maintenir celui-ci à un niveau qui autorise l’accession à la propriété immobilière.
Une parabole de l’Évangile va plus loin et insiste sur l’utilité pour le travailleur d’être propriétaire de son travail. Un employé gardait des brebis. Quand le loup vint, il les laissa attaquer et prit la fuite. Mais le propriétaire arriva, et risqua sa personne pour les protéger (Évangile de St Jean, X, 12). Notre-Seigneur Jésus-Christ démontre l’intérêt de rendre les travailleurs propriétaires d’une partie de l’entreprise. Parce que la propriété du travail et de ses gains directs donne de la motivation.
Mais avant la motivation au travail – motivation pour le salaire et pour le bien de l’entreprise – Saint Thomas d’Aquin mentionne la motivation pour entretenir ses propres biens, qui est antérieure. « Chacun donne des soins plus attentifs à la gestion de ce qui lui appartient en propre qu’il n’en donnerait à un bien commun à tous et à plusieurs. » (Somme théologique, IIa IIae, q. 66, a. 2). Ce qui est possédé en commun risque d’être négligé.
Claire attribution des responsabilités
Saint Thomas manifeste un deuxième intérêt de la propriété privée en montrant qu’elle permet l’ordre dans l’administration des biens : « il y a plus d’ordre dans l’administration des biens quand le soin de chaque chose est confié à une personne, tandis que ce serait la confusion si tout le monde s’occupait indistinctement de tout. »
Eloignement des causes de conflit
Enfin, l’Aquinate mentionne le dernier intérêt de la propriété. « La paix entre les hommes est mieux garantie si chacun est satisfait de ce qui lui appartient : on constate en effet, de fréquentes querelles entre ceux qui possèdent une chose en commun et dans l’indivis. » De nombreuses options sont toujours envisageables pour faire fructifier un bien. Il est normal que des propriétaires différents aient des visions différentes sur la gestion. D’où la nécessité d’une propriété vraiment individuelle, pour que les affaires soient gérées sans conflits.
Conclusion
Pie XII résume les intérêts de la propriété privée : c’est « un élément de l’ordre social, un présupposé nécessaire des initiatives humaines, un stimulant au travail : tout cela au profit des fins temporelles et transcendantes de la vie. » (Message radiophonique, Oggi, al compiersi du 1er septembre 1944) —
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Newsletter N° 255 – 16 avril 2025 | Source : Perspective catholique