Eric Bertinat – La situation est complexe. En 2010, la charmante conseillère nationale UDC de Lucerne, Yvette Estermann, proposait de supprimer l’heure d’été, introduite lors du choc pétrolier des années 1970 pour optimiser l’utilisation de la lumière du jour et ainsi économiser de l’énergie.
Elle appuyait sa proposition sur de nombreuses études démontrant que cet objectif n’avait pas été atteint. L’instauration de l’heure d’été aurait même engendré des coûts supplémentaires – notamment en raison de l’augmentation de la consommation d’électricité et de la pollution – se chiffrant à plusieurs millions de francs dans de nombreux pays.

En tant que médecin, la Lucernoise soulignait également les conséquences sanitaires : un risque accru d’infarctus du myocarde, un manque de sommeil chronique touchant une large part de la population pendant des mois, et des effets négatifs particulièrement marqués chez les malades chroniques. Cerise sur le gâteau : selon une étude du professeur Christoph Randler de la Pädagogische Hochschule de Heidelberg, les jeunes seraient aussi durement touchés, avec une baisse des performances scolaires et des résultats.
Bien entendu, sa demande fut rejetée, tant que la Suisse reste alignée sur ses voisins européens, eux-mêmes encore soumis à la politique de Bruxelles.
Là où la situation se corse, c’est que l’Union européenne continue, pour des raisons peu claires, à maintenir le changement d’heure, soutenue par une majorité de ses 720 députés.
Et la complexité s’intensifie encore avec la décision récente du Département de l’enseignement du canton de Vaud, qui prévoit de tester un report de l’heure de début des cours pour 1 000 élèves du secondaire. Dès la rentrée 2025, le collège de Béthusy débutera les cours à 8h15 au lieu de 7h45, pour mieux s’aligner sur l’horloge biologique des adolescents.
Soit ! Puisque l’on évoque notre propre horloge biologique, rappelons qu’en Suisse, en hiver, il existe déjà un décalage d’environ une heure entre l’heure légale et l’heure solaire. En été, on ajoute encore une heure, soit un décalage total de deux heures. Avec les 30 minutes supplémentaires prévues dans les écoles, les adolescents se retrouveront donc décalés de deux heures et demie par rapport au rythme naturel de la lumière.
En somme, alors que les impacts négatifs de l’heure d’été sur la santé, l’économie et le bien-être sont de mieux en mieux documentés, l’incohérence entre les décisions politiques et les besoins biologiques des citoyens, en particulier des jeunes, devient de plus en plus flagrante. Il est peut-être temps de réévaluer sérieusement notre rapport au temps légal, à la lumière du bon sens, de la science… et du soleil. —

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Newsletter N° 257 – 14 mai 2025 | Source : Perspective catholique