Votation fédérale : Le service citoyen

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Nicolas Moulin – Ce 30 novembre prochain, le peuple suisse se prononcera pour accepter ou refuser l’initiative populaire : «pour une Suisse qui s’engage». Les troubles géopolitiques et la croissance de l’individualisme effraient et ont pour conséquence la volonté de renforcer la cohésion sociale. L’initiative entend réformer le système d’engagement des citoyens en obligeant les hommes comme les femmes à servir leur pays. La Confédération assure pourtant que les effectifs actuels sont suffisants pour garantir la sécurité nationale. Entrons dans le débat où idéologie et pragmatisme se confrontent.

Le comité de l’initiative présente les arguments suivants dans le carnet mis à disposition du peuple. Le service citoyen entend rassembler les jeunes et raviver la solidarité au-delà des frontières linguistiques. Cette initiative répond donc « aux nouvelles menaces » provenant des guerres, de la cybercriminalité et du réchauffement climatique par une mobilisation plus conséquente. Cet engagement de la jeunesse assurerait « un enrichissement personnel et un gain pour notre économie et notre société ». Et finalement, la Suisse, en investissant davantage dans la sécurité, se dote de jeunes gens responsables et capables de se montrer solidaires en cas de crise.

Voilà en résumé l’argumentaire présenté en faveur du service citoyen auquel répond la Confédération. Le refus de l’initiative par nos élus de Berne est massif et s’encre dans une vision pragmatique des conséquences économiques de la réforme. La Suisse a besoin de se protéger et elle le fait déjà par son armée et sa protection civile dans lesquelles un nombre suffisant de jeunes sont recrutés chaque année. Cette initiative promet des conséquences néfastes pour les entreprises qui seront privées d’un plus grand nombre de leurs employés, affectant ainsi leur productivité. La Confédération déplore ensuite une augmentation substantielle des coûts liée à l’APG ainsi qu’à l’assurance militaire. De plus, le recrutement obligatoire des femmes ajoute un fardeau conséquent à celles qui s’occupent souvent de l’éducation des futures générations sans rémunération. Et finalement, il n’est pas sûr qu’assez de postes puissent être créés pour ces 70’000 jeunes recrues annuelles.

Pour résumer, il s’agit de recruter les jeunes suisses et suissesses pour les assigner au service du bien commun afin que ceux-ci deviennent responsables et solidaires. Quoique reposant sur de solides principes, c’est dans sa réalisation que l’édifice révèle sa fragilité. Premièrement, les coûts engendrés par cette initiative sont incommensurables. l’APG et l’assurance sont une chose mais la structure administrative permettant la gestion d’une « entreprise » de 35’000 personnes supplémentaires a, elle aussi, son coût. L’encadrement et la formation des jeunes est également à pourvoir puisqu’ils arriveront au travail sans expérience ni compétences. Voilà tout un aspect que l’initiative ignore ou presque puisqu’elle pointe du doigt que la Suisse dépense moins d’1% de son PIB pour la sécurité tandis que d’autres pays sont proche des 5% : à elle d’y mettre plus de ressources !

Le constat d’un individualisme croissant ne rassure guère et la volonté d’y trouver une solution est plus que louable. Si les jeunes s’isolent et ne s’engagent pas, est-ce qu’un bénévolat forcé les fera changer de cap ? Permettez mon scepticisme. Le don de soi, l’altruisme et la solidarité prennent leur source dans un idéal. Un récent article du Blick constate l’essor du catholicisme traditionnel en particulier chez les jeunes et la raison provient de la découverte d’un idéal, du transcendantal. Dès lors, on organise des pèlerinages, des conférences, des mouvements, des camps etc. Oui, la jeunesse est généreuse et encore capable de se donner à condition que l’idéal pour lequel elle s’engage en vaille la peine. Ainsi donc, on s’engagera certainement pour une Suisse forte et souveraine qui sait défendre son indépendance, une Suisse fière de sa culture et patriote. Mais une Suisse qui forcerait ses jeunes pousses à rendre un culte à la nouvelle religion climatique sous prétexte de servir le bien commun ou à leur attribuer des activités de gens à faible revenu sans que ceux-ci soient qualifiés ne fera qu’augmenter les recettes de la taxe d’exemption.

Votez NON à cette initiative populaire qui ne renforce nullement la sécurité du pays. Fortifions plutôt notre armée s’il est question de sécurité. Et s’il s’agit de voir s’engager la jeunesse, donnons-leur un pays pour lequel ils sacrifieraient leur vie pour sa défense.

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