Eric Bertinat – Une excellente enquête de la RTS: «La face cachée du suicide assisté en Suisse», diffusée le 9 février 2025, suscite des remous jusqu’à Berne. Il y est question du pentobarbital de sodium qui est utilisé à fortes doses pour pratiquer dans l’aide au suicide en Suisse où cette pratique est légale et provoque une mort sans douleur. Remises sur ordonnance, les doses ne sont pas toujours utilisées. Soit la personne choisissant d’être euthanasiée revient sur sa décision, soit elle meurt de mort naturelle avant l’intervention d’Exit. Que deviennent alors ces doses inutilisées ? La majorité des cantons romands perdent leur trace, elles n’ont pas de moyen de vérifier si elles ont été effectivement utilisées. Tout ce trafic reposant sur la confiance que les pharmacies ont avec Exit. Précisons qu’il existe un Protocole très clair : les doses inutilisées doivent être restituées.
La journaliste Cécile Tran Tien fait son boulot. Elle cherche à comprendre et commence par interroger les pharmacies romandes. Qu’elle n’est pas sa surprise de découvrir qu’Exit Romandie a informé toutes les pharmacies de son enquête. Un mail a été envoyé à toutes les pharmacies. «A la demande de l’association, je vous informe qu’une journaliste se renseigne actuellement auprès des pharmaciens au sujet de s doses de pentobarbital. Le médecin cantonal vaudois et le responsable des pharmacies romandes sont au courant de cette démarche. Nous vous prions de ne donner aucun renseignement à cette personne [Cécile Tran Tien], ceci étant strictement confidentiel».
Marché noir ?
Où passe donc ces doses de pentobarbital ? A l’étranger où elles sont très recherchées, elles alimentent ainsi le trafic international et le Dark web, ces contenu de réseaux superposés qui utilisent l’Internet public, mais qui sont seulement accessibles via des logiciels, des configurations ou des protocoles spécifiques. C’est ce qu’a trouvé Cécile Tran Tien, certaines de ces doses, provenant de Suisse, se vendent jusqu’à 8’000 frs, alors qu’elles coûtent moins de 100 frs dans une pharmacie suisse. Notons encore qu’en 18 années, seules deux doses ont été détruites alors que vraisemblablement, plusieurs dizaines de doses circulent.
Faille de sécurité
En Suisse, la traçabilité est lacunaires, des flacons peuvent se retrouvé dans la nature. Voilà une situation qui interpelle, pour le moins. D’autant plus qu’Exit refuse de répondre, fuyant tout contact avec la reporter. Qui apprend que la formation d’accompagnateur Exit pour personnes en fin de vie de base est faible voire inexistante.
Questionné par Thomas Bläsi (UDC/GE) et Benjamin Roduit (Le Centre/VS), le Conseil fédéral a répondu lundi 10 mars que les questions soulevées relèvent de la compétence des cantons. D’éventuels indices de violation des devoirs professionnels et des règles des sciences médicales et pharmaceutiques doivent dès lors être déclarés à l’autorité cantonale de surveillance, «qui ordonnera les mesures appropriées ».
Son organisation sera auditionnée en avril par la Commission des affaires juridiques du Conseil des États. À la suite de l’utilisation de la capsule Sarco dans le canton de Schaffhouse, qui fait l’objet d’une instruction pénale, les élus envisagent en effet de durcir la loi. Précisons qu’Exit n’a pas employé cette technologie controversée. —
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Newsletter N° 255 – 16 avril 2025 | Source : Perspective catholique