Les dimanches à Genève : symptômes d’un déclin

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Abbé Thibault de Maillard – Le débat sur l’ouverture des commerces trois dimanches supplémentaire par an est celui d’une société matérialiste. Il est question de concurrence, de chiffres d’affaires, d’emploi et de conditions de travail. Les conditions de repos, ou plus précisément les conditions de la vie spirituelle, font pourtant partie d’une société civilisée, où la vie économique, politique, industrielle, ne sont là que pour laisser la meilleure place à l’exercice de l’esprit.

Adapter la législation aux nécessités économiques relève certes d’une choix politique qui doit trancher là où l’évidence n’existe que rarement. Il est trop facile de critiquer des décisions prudentielles, qui, comme telles, doivent nécessairement comporter des sacrifices. La prudence obéit cependant à des principes, et à un ordre de priorité. Il s’agit de choisir entre sacrifier l’économie, ou sacrifier le temps de la vie de l’esprit.

Le propre d’une société matérialiste est malheureusement de vouloir gagner toujours plus. Si ce désir ne trouve pas de limite, la vie spirituelle de beaucoup sera piétinée. Le vrai choix politique relève donc d’une proportion. Il s’agit de gagner suffisamment pour permettre à chacun d’avoir une vie équilibrée. Le respect du dimanche est une condition nécessaire pour vivre sainement : mieux qu’un jour de repos, c’est le jour consacré aux choses gratuites : prier, se cultiver, développer la vie sociale et pratiquer les arts. « Mieux vaut une poignée de repos que deux poignées de travail à poursuivre le vent. » Ecclésiaste 4, 6

Dans cette perspective, le travail du dimanche prend la figure d’un voleur. Si de graves nécessités pourraient autoriser de compromettre la pratique dominicale de la vie de l’esprit, le citoyen appelé à voter cherche malgré tout à savoir combien perd l’économie pour que 15’000 personnes doivent sacrifier trois dimanches supplémentaires chaque année à Genève.

Si notre économie n’est plus capable aujourd’hui de garantir à chacun les loisirs convenables, il faut accepter de déduire que notre société est en déclin. Dans ce cas l’économie fait figure d’incapable.

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Newsletter N° 59 – 28 octobre 2021 | Source : Perspective catholique

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Eric Bertinat
Éric Bertinat est une figure active du catholicisme traditionaliste et de la politique genevoise. En 1988, il cofonde la revue Controverses, influente dans les milieux catholiques traditionalistes francophones. Il fonde également en 2010 l’association Perspective catholique, engagée sur des questions sociétales en lien avec la doctrine chrétienne. Journaliste et collaborateur régulier de plusieurs publications (Le Vigilant, Présent, Una Voce Helvetica, etc.), il entame aussi une longue carrière politique. Élu député au Grand Conseil de Genève en 1985 sous la bannière de Vigilance, il y revient en 2005 et occupe plusieurs postes clés jusqu'en 2013. Il est également membre du Conseil municipal de Genève dès 2011, y occupant diverses présidences de commissions jusqu'en 2021.Il en est élu président le 5 juin 2018 pour 2018-2019.

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