Pourquoi des milliers de Suisses quittent leur pays

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Jean-Pierre Saw – «Les Suisses n’ont jamais autant émigré depuis ces dix dernières années» titrait le Blick ce 20 octobre 2025. L’accroche est trompeuse, car il est précisé plus tard : «Jusqu’au mois d’août, plus de 68’000 personnes ont quitté le pays». ll ne s’agit en fait pas des Suisses uniquement, mais également des étrangers venus travailler chez nous, et qui rentrent chez eux.
Dans tous les cas, il est légitime de se demander, outre les fluctuations sur le marché du travail, ce qui pousse un Suisse à s’expatrier. Certes, les motivations professionnelles peuvent concerner une petite couche de la population, qu’elle soit hyperspécialisée, engagée par un groupe international ou active dans les métiers de la diplomatie et de l’humanitaire.
Mais pour les autres, il paraît évident que les motivations ne sont ni professionnelles – la carrière – ni économiques – le revenu, les deux allant généralement de pair. Un peu de recul permet de constater en effet que notre petit paradis alpin a bien changé en ce début de siècle.

Avec l’entrée en vigueur des bilatérale il y a 20 ans, le marché du travail s’est vu submergé de travailleurs venant principalement des pays voisins. Ces derniers ont apporté leurs talents, leurs connaissances, leurs points de vue et méthodes originales, contribué ainsi à la richesse de notre pays. Mais ils sont également venus occuper un appartement, une place dans le train entre Lausanne et Genève, si pas rajouter une voiture aux bouchons toujours plus denses entre les deux villes.
L’État encourage bien sûr chacune de ces arrivées, puisque chaque personne active est également un contribuable. Les sociétés de construction, les architectes, les ingénieurs, tous les acteurs liés au logement et au transport se réjouissent aussi de cet afflux, car ils en bénéficient directement.

Mais le travailleur lambda, donc le loyer a augmenté, quand il n’a pas dû passer la frontière pour pouvoir devenir propriétaire ; dont le trajet quotidien s’est rallongé, et dont les enfants doivent à présent passer par des stages non rémunérés pour trouver un travail, voit plutôt une baisse notable de ce qu’on appelle la «qualité de vie».
Pire : ce même travailleur a vu changer non seulement l’aspect de nos campagnes, mais aussi le paysage humain de nos villes. Celles-ci ressemblent de plus en plus à toutes les métropoles occidentales : hétérogènes, anonymes, théâtres réguliers de manifestation étrangères revendicatives, comme de violences de rue dont les media ne se font pas toujours l’écho.
À force de s’ouvrir à tous vents, la Suisse s’est ainsi nivelée par le bas, comme si elle avait eu honte de sa réputation d’ordre, de propreté, de sécurité et d’immigration contrôlée. Sans compter la part de tension inconsciente que la criminalisation de la conduite routière a introduite dans la vie des gens…

Voilà qui frappe très clairement celui qui revient au pays, et a dû lasser ceux qui le quittent… La politique des dernières décennies, contrairement aux promesses de nos élites, a lentement délité ce qui faisait notre spécificité, et l’essence même de notre pays est en train de changer sous nos yeux.

En réaction, plusieurs initiatives permettront, chacune à sa façon, de reprendre en main notre destin. Nous voterons ainsi ces deux prochaines années sur un plafond de population, sur la démocratie directe et la compétitivité du pays, sur la sauvegarde de la neutralité et, surtout, sur le paquet d’accords avec l’Union européenne. Nous aurons l’occasion de revenir en temps voulu sur chacun de ces objets.

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