Olivier Dehaudt – Depuis 7 ans, avec une accentuation ces derniers mois, puisque la loi était en discussion au Parlement et qu’elle fait maintenant l’objet d’un référendum, on nous rabâche les oreilles avec le « mariage pour tous ».
L’initiative parlementaire « Mariage civil pour tous » a été déposée le 5 décembre 2013. Croyez-vous vraiment que c’est le « mariage pour tous » qui a préoccupé les parlementaires pendant ces sept longues années ?
Croyez-vous vraiment qu’il ait fallu sept longues années de discussions pour trouver les nouveaux mots de l’article 94 du Code civil ? Sept années de palabres pour passer de « Pour pouvoir contracter mariage, l’homme et la femme doivent être âgés de 18 ans révolus et capables de discernement » à la nouvelle définition : « Le mariage peut être contracté par deux personnes âgées de 18 ans révolus et capables de discernement. » N’avez-vous pas l’impression qu’on vous mène en bateau ?
Eh bien oui, depuis sept ans, les promoteurs du « mariage pour tous » vous mènent en bateau. A force de vous répéter que les femmes homosexuelles sont victimes d’inégalités, vous avez failli par y croire. Vous avez reculé, pas après pas, sur le terrain de vos convictions. Vous avez lâché du lest, abandonnant l’une après l’autres vos certitudes pour entrer finalement avec eux dans une sorte de no man’s land, littéralement une « terre sans homme ».
La véritable lame de fond qui porte le « mariage pour tous » est là, c’est l’ouverture bien grande des portes de la procréation médicalement assistée (PMA). Acceptée en votation populaire en 1998, entrée en vigueur en 2001, comme toutes les lois progressistes, elle est devenue au fil des ans trop restrictive au goût de certains. Rosemarie Siegenthaler ne disait-elle pas, en 2018, dans un postulat adressé au Conseil fédéral : « Les progrès rapides de la médecine reproductive et les nouvelles possibilités qu’elle offre, mais aussi l’évolution des valeurs de la société, conduisent à penser que cette loi est dépassée, ne serait-ce qu’au regard de la pluralité des modes de vie. » (www.parlament.ch)
Cette ouverture bien grande des portes de la PMA a-t-elle pour but de combler la fameuse inégalité des lesbiennes qui en étaient jusque-là exclues ? Vous le croyez, bien entendu, et de ce fait on continue de vous mener en bateau.
On vous mène en bateau
Et là je cite simplement Olivia Sarton, juriste et directrice scientifique de l’association Juristes pour l’enfance, dans son livre la PMA : Ce qu’on ne vous dit pas : « En réalité, les instigateurs de l’extension de la PMA ne se soucient guère d’un pseudo-droit des femmes homosexuelles ou seules. L’existence d’une prétendue inégalité ou d’une prétendue confiscation d’un droit des femmes sur leur corps ne les émeut pas non plus.
L’enjeu, le véritable enjeu, de l’ouverture de la PMA à tous sans nécessité médicale, ce sont les milliards d’euros que représente le marché de l’assistance médicale à la procréation.
Ces milliards sont convoités par des fonds d’investissement et des financiers avides de profiter d’un gigantesque marché à leur portée, qui semble multipliable à l’infini sur la génération en cours et sur chaque génération à venir. Ces milliards vont enrichir les financiers détenteurs de « cliniques de fertilité » mais aussi assouvir l’ivresse interventionniste de technoscientifiques impatients de s’approprier le corps humain : l’ambition financière s’appuie en effet sur le débridement d’une technoscience convaincue d’avoir enfin à sa portée les clés de la création et de la manipulation du vivant, et en premier lieu de l’être humain appréhendé désormais comme « chantier technologique » (…) Dans ce projet d’investissement financier et d’activité scientifique qui concerne tout l’être humain, la PMA occupe une place de choix au niveau mondial. »
Et pour cela, en Suisse comme ailleurs dans le monde, il fallait faire tomber les contraintes légales freinant l’extension de la PMA. Le « mariage pour tous » n’est pas tant une loi qui ouvre la PMA à tous, qu’une loi qui ouvre aux acteurs du marché de la PMA l’accès à une clientèle démultipliée.
Mais ne nous trompons pas !
La cible réelle du business de la procréation n’est pas les lesbiennes, mais les personnes fertiles naturellement, car bien plus nombreuses. Comme le dit encore Olivia Sarton : « L’enjeu est donc de les convaincre des bienfaits de la procréation sans sexe, qui seule génère un chiffre d’affaires. La reproduction naturelle en effet ne rapporte rien au marché de la procréation, c’est pourquoi il faut inciter les couples fertiles à passer eux aussi par la technique. »
Rendre payante la conception d’un enfant qui est l’acte le plus vieux du monde, que tout couple peut réaliser de lui-même sans débourser un centime, constitue une véritable gageure. Mais les promoteurs du marché de l’humain ne doutent pas de parvenir à disqualifier la procréation naturelle au bénéfice de la procréation artificielle. Henri T. Greely, directeur du Center for Law and Biosciences de l’université de Stanford ne prédit-il pas : « Dans vingt à quarante ans, la plupart des gens dans le monde qui auront une bonne couverture médicale choisiront de concevoir en laboratoire. » (iatranshumanisme.com)
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Lettre d’information N° 43 – XX mars 2021 | Source : Perspective catholique