Christian BlessAprès avoir déjà publié un premier ouvrage sur le sujet sous la plume de Mgr. Athanasisus Schneider, Corpus Christi – la communion dans la main au cœur de la crise de l’Église, les éditions Contretemps, sous la direction de Jean-Pierre Maugendre, Président de Renaissance catholique, nous offrent aujourd’hui un ouvrage réunissant les contributions de plusieurs plumes érudites en matière de liturgie qui nous permettent d’approfondir le sujet sous la forme d’un Bref examen critique de la Communion dans la main, préfacé par le cardinal Raymond Burke.

D’emblée, ce dernier place le sujet au niveau d’importance qui convient en citant Saint Thomas d’Aquin : « Le bien commun spirituel de toute l’Église réside substantiellement dans le Sacrement de l’Eucharistie. » Le sujet est donc grave. Éditeur également du Bref examen critique du Nouvel Ordo Missae des cardinaux Ottaviani et Bacci, Jean-Pierre Maugendre souligne dans son introduction la situation dramatique dans laquelle sont placés les fidèles en citant notamment Mgr. Athanasisus Schneider : « Jamais dans toute l’histoire de l’Église, il n’y a eu de moment où le sacrement de l’Eucharistie a été bafoué et outragé à un degré aussi alarmant et grave qu’au cours des cinq dernières décennies, en particulier depuis l’introduction officielle de la pratique de la Communion dans la main, qui a reçu l’approbation du pape en 1969 » et le cardinal Ratzinger, futur pape Benoît XVI : « Je suis convaincu que la crise de l’Église que nous vivons aujourd’hui repose largement sur la désintégration de la liturgie ».

Il revient à l’abbé Claude Barthe, bien connu pour ses ouvrages consacrés à la liturgie, de décrire les différentes étapes de ce processus d’introduction de la communion dans la main, en rendant hommage à Jean Madiran qui, sans doute le premier, dénonça ce coup de force feutré dans la revue Itinéraires dès 1969. Page après page, le savant liturgiste rappelle les étapes qui, au mépris d’une tradition immémoriale et du droit en vigueur, introduisirent de force des pratiques qui ont affaibli, puis fait disparaître la foi dans la Présence réelle du Christ, vrai Dieu et vrai Homme, dans le Saint-Sacrement. « C’était le temps de la réforme liturgique, dont on sait qu’elle a participé largement à cette déstabilisation non seulement du culte, mais aussi de l’institution ecclésiale elle-même » écrit-il.

L’on peut d’ailleurs se demander si ce terme de réforme est bien adéquat et ne tend pas à brouiller les pistes. En effet, initialement, il n’y a pas eu une réforme mais bel est bien une révolution avec la volonté de faire table rase des pratiques liturgiques immémoriales, c’est une volonté de destruction qui s’est inscrite contre le rite traditionnel de la messe, sous prétexte de retour à des pratiques antiques et de simplicité, avec l’intention d’ « une atténuation de ce que la doctrine sacrée avait d’antinomique avec la modernité » mais, comme le souligne encore l’abbé Barthe : « Or, la foi en la présence réelle du Christ sous les espèces du pain et du vin était aussi peu moderne que possible ». On ne peut donc imaginer la possibilité d’une réforme de la réforme, mais la lente disparition d’une dynamique révolutionnaire et le retour progressif du rite tridentin. Est-il sérieusement envisageable que l’on puisse réformer un rite qui « s’éloigne de façon impressionnante, dans l’ensemble comme dans le détail, de la théologie catholique de la Sainte Messe, telle qu’elle a été formulée à la XXIIè session du Concile de Trente … » ? (Lettre à Paul VI des cardinaux Ottaviani et Bacci)

Le rappel historique de l’abbé Claude Barthe est complété par un point de situation détaillé sous la plume de Jeanne Smits. Notre mémoire submergée d’informations tend à oublier le déroulement des événements. Ces deux contributions viennent nous rappeler cette invraisemblable succession de coups de force qui ont fait violence aux âmes et au droit, parfois des violences physiques, pour imposer des pratiques maintes fois condamnées. Le Père Réginald-Marie Rivoire, de la Fraternité Saint-Vincent-Ferrier, docteur en droit canonique consacre plusieurs pages aux abus juridiques en la matière.

Ce Bref examen critique nous offre une longue revue des sources historiques consacrées à la pratique de la communion à travers les âges sous la plume érudite du Chanoine Grégoire de Guillebon, prêtre de l’Institut du Christ-Roi Souverain Prêtre. Examinant minutieusement la question de la communion dans la main aux temps apostoliques, l’auteur nous présente les textes des Apôtres et des Pères de l’Église afin d’examiner quelles ont été les pratiques dès les origines. Rappelant que « … l’antiquité n’est pas un critère absolu de discernement … », le Chanoine écrit d’entrée qu’ « il n’est pas possible, dans l’état actuel de nos connaissances, d’établir l’antériorité de la Communion sur la paume par rapport à la Communion sur la langue … » en précisant que « la Communion dans la main telle qu’elle est administrée de nos jours est une véritable nouveauté. » Des Saintes Écritures à Saint Grégoire le Grand, en passant par Saint Justin, Saint Cyprien de Carthage, Saint Ambroise, les synodes et les conciles, et tant d’autres textes, le savant auteur nous propose des lectures passionnantes qui nous aident à mieux connaître l’Église et son histoire ainsi qu’à nourrir notre foi et notre respect pour le Sacrement des Sacrements, selon les termes utilisés par le cardinal Burke.

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Lettre d’information N° 47 – 20 juin 2021 | Source : Perspective catholique