Marc-André Mabillard, avocat des recourants (communiqué de presse) – Le Tribunal cantonal valaisan, dans un arrêt du 8 février dernier (cause A1 20 189), a désavoué le Conseil d’État qui limitait à dix personnes l’assistance au culte dans une décision du 21 octobre 2020.
Quand bien même cette mesure avait été révoquée par le Conseil d’État dans une décision du 19 novembre autorisant les services religieux dans le respect de la jauge fédérale de 50 personnes, le Tribunal cantonal a accepté d’analyser les arguments des recourants, condamnant l’État du Valais à payer les dépens de leur avocat.
Nous nous permettons de citer ici le considérant 6.4.3 du Tribunal cantonal qui expose pourquoi il aurait dû casser la décision de limitation à 10 personnes, si celle-ci avait encore été d’actualité:
“Cela étant, même examinée avec cette retenue, les critiques des recourants auraient probablement dû être admises sur ce plan [principes de la proportionnalité et de l’égalité de traitement NDLR]. L’exécutif cantonal explique que des foyers ont été identifiés à Mulhouse, à Séoul ou encore à Qom, en Iran, sans toutefois chercher à démontrer en quoi ces rassemblements, qui ont eu lieu au début de la pandémie et en l’absence de mesures de protection telles qu’elles s’appliquent en Valais, pourraient être valablement comparées avec les cultes ayant lieu sur le territoire cantonal. Cela étant, en l’absence de toute preuve quant aux risques particuliers de contamination que pourrait constituer la fréquentation en elle-même de lieux de cultes valaisans, limiter à 10 personnes les rassemblements religieux sur l’ensemble du territoire cantonal ou refuser une demande de dérogation pour une célébration particulière, sans considération aucune de la grandeur des lieux de culte – ce qui n’est pas loin d’équivaloir, dans les faits, à une interdiction – ne résiste pas à l’examen sous l’angle de la nécessité, de l’exigibilité voire de l’arbitraire [mis en gras par la rédaction]. La limitation des mouvements et du brassage de la population ne justifie pas l’atteinte ainsi portée à la liberté alors que, dans un même temps, certains commerces non essentiels ou les marchés n’étaient pas touchés respectivement autorisés et enregistraient des affluences notoirement importantes. Il convient ainsi d’admettre que, sous cet angle, le recours aurait eu de sérieuses chances de succès.”
Plus haut dans sa décision, le Tribunal cantonal a encore soulevé que “l’argument du Conseil d’État tiré de la possibilité de recourir “aux technologies de l’information” n’est, en outre, pas déterminant au regard du droit de participer en commun à une célébration de rites, ce qui est le propre du culte et de la liberté correspondante que garantit l’article 15 Cst.” (consid. 6.4.2).
En Valais, le Conseil d’État aura donc été désavoué par l’instance judiciaire après avoir été rappelé à l’ordre par le Grand-Conseil le 13 novembre 2021: en acceptant deux postulats urgents, les députés avaient avancé les mêmes arguments que ceux qui ont été retenus par le Tribunal cantonal.
Il était très important que le Tribunal cantonal constate cette violation d’un droit primordial. Nous sommes donc satisfaits que le Valais ne sera plus, à l’avenir, un territoire d’exception à l’application du droit commun rappelé par les autorités judiciaires françaises, américaines et genevoises en fin d’année dernière: La liberté de culte est un droit constitutionnel et les gouvernants ne peuvent pas la maltraiter.
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Lettre d’information N° 41 – 19 février 2021 | Source : Perspective catholique