Eric Bertinat – Pour paraphraser saint François de Sales qui disait Un saint triste est un triste saint, les chrétiens célébreront cette année un Noël triste (qui) est un triste Noël. Bien sûr, nous accueillerons avec la même joie la célébration de la naissance du Fils de Dieu. Nous serons saisi de la même manière par la grandeur des desseins de Dieu, par la noblesse de Jésus-Christ, à la fois Dieu et à la fois homme, venu en ce monde dans la pauvreté d’une crèche. Mais la dureté de nos autorités à l’égard du Christ n’aura échappé qu’aux niais.

Les mesures purement sanitaires et principalement cantonales ne peuvent être suffisantes pour piétiner la liberté de conscience et de croyance. Et ce, même si le Conseil fédéral a introduit le 9 décembre dernier dans l’ordonnance COVID-19 (situation particulière) une nouvelle teneur à son article 8: Le canton prend des mesures supplémentaires au sens de l’art. 40 LEp si : (…) Ce faisant, il garantit notamment l’exercice des droits politiques et la liberté de conscience et de croyance. Il consulte préalablement l’OFSP et l’informe des mesures prises.

D’évidence, les cantons n’ont guère tenu compte de ce qui devait être garanti et, pire, posent des conditions de petits dictateurs aux paroisses. Parmi celles-ci, nous retiendrons l’obligation qui a été faite aux catholiques vaudois de rester assis (voir également le texte du professeur Dufour : Un Noël sans chants de Noël). Donc, l’obligation de ne plus s’agenouiller, si peu en lien avec la propagation d’un virus. Sauf à éternuer du genou, bien évidemment… On devine sans peine qui se cache derrière pareil interdit. S’agenouiller, pour tout fidèle, est une évidence remontant aux premiers chrétiens. Avec eux, nous regardons vers la Jérusalem céleste, avec eux nous jouons de cet instrument qu’est le corps : les mains, les yeux, la voix, le fléchissement des genoux et l’inclination profonde. Souvenez-vous de saint Augustin, nous rappelle Dom Gérard (Benedictus, écrits spirituels, tome I) : l’affection du cœur s’accroît par les gestes qui la traduisent.

Vous avez été nombreux à manifester votre attachement à la messe

Des recours ont été déposé et nous profitons de cet article pour remercier du fond du cœur les avocats qui se sont dévoués pour défendre l’accès aux cérémonies religieuses. Perspective catholique a déposé une pétition auprès des chancelleries de Vaud, Valais et Genève. Ce dernier nous a donné réponse le 14 décembre. M. le Conseiller d’Etat, Mauro Poggia, nous précise que l’exécutif genevois, dans le respect des décisions judiciaires (levée de l’effet suspensif) a édicté des mesures sanitaires pour la reprise des messes. Des mesures que nous jugeons à la fois grotesques (parce qu’intrusives dans les célébrations elles-mêmes) et inadaptées dans la mesure où la liberté de conscience est limitée, malgré le rappel fédéral.

Le 23 décembre, c’est au tour du délégué vaudois aux affaires religieuses, M. Pascal Van Griethuyen, de donner suite à notre pétition. En des termes très courtois, qu’il convient de relever, il dit être conscient du caractère particulièrement contraignant des mesures de limitation imposées par le Conseil d’État à la population vaudoise en général et aux croyants en particulier. Mais lui-aussi en revient aux mesures sanitaires pour justifier une limite à 50 personnes selon le droit fédéral. Mais de liberté religieuse, rien, désespérément rien ! Et de réponse du canton du Valais, rien. Encore moins pouvons-nous dire.

Accablés par un virus qui ne trouve de réponses que dans l’uniformité des mesures gouvernementales et le rejet de tout discours divergeant, les chrétiens vivront Noël sous une nouvelle forme, oubliée depuis de nombreuses années, celle exclusivement autorisée par l’État. Ce Noël triste est un triste Noël, nous voilà recensés, inspectés, en liberté conditionnel. Mais qu’importe : nous ne lâcherons pas, nous ne lâcherons rien ! Nous connaissons la fin de l’histoire : cet enfant que nous célébrons dans la nuit de Noël a déjà vaincu ce triste monde qui n’est qu’un monde triste. Joyeux et saint Noël à tous !

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Lettre d’information N° 35 – 24 décembre 2020 | Source : Perspective catholique