Alexandra Klucznik-Schaller – Sobriété et discernement, les Éditions Meystre sont une toute jeune et grande ambition catholique. Xavier Meystre, Vaudois de 30 ans, réédite de grands auteurs oubliés, propose des conférences et organise des rencontres ; son prochain, et 3ème Salon Gonzague de Reynold se tiendra le 18 janvier 2025 à Crans-Montana (voir affiche page 4). Son public ? Lettré, ouvert d’esprit, âgé de 45 ans et plus.
Son public cible ? Ses conscrits, fondamentalement c’est à eux que sa démarche s’adresse…

AKS : Vous avez créé les Éditions Meystre ou est-ce que la maison existait déjà ?
XM: L’idée m’est venue il y a trois ou quatre ans, et j’ai mis environ deux ans à mettre les choses en place. Mon arrière-grand-père avait lancé une entreprise spécialisée dans le papier peint, et j’ai hérité de cette attache aux ornements sur la matière ainsi que d’un certain esprit d’entreprise. Les ouvrages sont édités dans un format classique : couverture sobre, une belle épaisseur, papier épais ; j’ai voulu mettre les formes.
Mon idée est de proposer la bibliothèque idéale, j’édite les auteurs que j’aimerais faire connaître. J’aimerais proposer une ligne catholique, contre-révolutionnaire, et aristocratique. Aristocratique, non pas au sens de «hautain», il ne s’agit pas du tout d’arrogance, ni de snobisme. D’ailleurs, je ne suis pas moi-même issu d’un milieu aristocratique, mais il s’agit plutôt d’une recherche esthétique, si vous voulez une forme de dandysme chez quelqu’un issu du peuple, comme celui des Incroyables et des Merveilleuses au temps de la Révolution française, qui aspiraient à un style noble, distingué. J’aimerais que l’on fasse davantage attention à la forme. Notre civilisation a tendance à perdre tout rapport avec la forme, la courtoisie, et l’élégance. Et c’est dommage.

AKS : Donc vous êtes-vous même catholique et issu d’une famille pratiquante ?
XM : Mes deux parents sont protestants et pas du tout pratiquants. Moi, cependant oui, je me suis converti au catholicisme, il y a trois ans, j’ai eu un déclic et j’ai franchi le pas. La pandémie vécue a été un accélérateur dans ma prise de conscience : notre époque souffre de maux auxquels il faut répondre en réarmant l’esprit. Nous avons la droite la plus bête du monde : une droite qui s’attaque uniquement aux conséquences et jamais aux causes des maux dont nous souffrons. J’en avais assez de toujours parler des conséquences et j’ai choisi de m’attaquer aux causes. Et la cause principale des maux de notre monde, c’est l’apostasie, c’est-à-dire l’abandon de notre religion, principalement l’abandon de la foi dans le Christ-Roi. C’est de là que découlent tous nos malheurs. Et le problème, c’est que les gens refusent de le voir.

AKS : Et c’est en retrouvant des auteurs du siècle passé que vous pensez trouver des formules qui pourraient aider à mieux vivre notre époque ?
XM : J’ai réédité Gonzague de Reynold qui n’est pas exactement un auteur oublié. En réalité, il a toujours une grande notoriété dans les profondeurs de la société, surtout en Suisse et surtout dans un milieu catholique, mais il faut bien dire qu’il est mis au ban intellectuellement par les intellectuels gauchistes et il mérite d’être remis à l’honneur. Poète, historien, historien de la culture, professeur de littérature, vrai aristocrate, Gonzague de Reynold avait une très grande plume et il avait une très bonne connaissance de la Suisse. Grâce à lui nous pouvons redécouvrir la richesse de notre culture. À cet égard je suis fier d’avoir réédité «l’Europe Tragique» que je considère comme un chef d’œuvre.
Puis est venu Henri Béraud, prix Goncourt, homme de gauche, fils de boulanger, qualifié malgré tout d’infréquentable dans les années 1930 par la République ; son parcours intellectuel m’a intéressé et il m’a semblé pertinent de partager ses observations.
Sur une lignée plus axée sur la morale et le rapport aux autres, j’ai choisi de rééditer Jules Rostaing : «Manuel de la Politesse, des usages du monde et du savoir-vivre», dans cet esprit de recherche de style et de dandysme que j’ai expliqué tout à l’heure, ainsi que l’abbé Charles Grimaud : «Futurs époux», un ouvrage qui paraitra désuet à certains mais qui parlera à ceux qui cherchent à redécouvrir les valeurs familiales traditionnelles. D’autres ouvrages suivront. À notre époque, il y a beaucoup de discordes entre les hommes et les femmes et avec ces deux derniers ouvrages j’essaie d’apporter un peu de nuances et de structure. On a perdu tout repère par rapport à ce que doit être un époux, à ce que doit être un homme, à ce qu’est la réelle virilité. On nous donne pour exemple des caricatures ; on a l’impression que le succès c’est d’avoir treize voitures ainsi que beaucoup de femmes, alors que je pense, au contraire, que la vraie virilité réside dans le fait de s’inscrire dans une lignée, d’avoir une épouse, des enfants, et de ne pas tomber dans les pièges modernes.
Les Éditions Meystre sont une maison qui propose des auteurs de conviction et évidemment, j’espère qu’elle rencontrera son public qui a la même recherche, mais c’est une gageure.

AKS : Vous faites également des vidéos et vous avez mentionné les salons Gonzague de Reynold que vous organisez. Est-ce pour pouvoir transmettre le même contenu sous une autre forme ?
XM : L’idée, c’est de créer une synergie ou si vous préférez un cercle vertueux, différents projets qui s’alimentent entre eux. J’organise des réunions en présentiel, des réunions en vidéos, et j’invite mes interlocuteurs à lire afin d’approfondir leurs connaissances.
(suite page 2) Je crois aussi que nous devons élever nos standards à bien des niveaux. Il faut avoir un certain niveau d’exigence en amitié, en amour, et aussi en politique, et non pas se contenter de demi-vérités ou de petites satisfactions qui ne sont au final que des demi-mensonges. Lorsque nous faisons des compromis avec la vérité, au lieu d’avoir des demi-victoires, nous avons au final de vraies défaites.
Et le problème, c’est que ces explications ne suffisent plus. Les gens ont besoin de vraies explications, alors oui, j’essaie également de proposer des analyses et ce sans forcément éviter les sujets qui fâchent… Certains diront qu’il faut être à l’intérieur du système, d’autres diront qu’il faut le combattre depuis l’extérieur. Ça, c’est une discussion sans fin. Moi je crois que notre plus grande arme, c’est la vérité.
La vérité et bien sûr, les vertus cardinales et théologales. Sans cela, on n’arrivera à rien.

Et, j’invite vos lecteurs à la 3ème édition du Salon Gonzague de Reynold (www.salongonzaguedereynold.ch), le 18 janvier 2025 à Crans-Montana, on y parlera d’apostasie, en compagnie de René Écochard, Pierre Hillard, et Dominique Tassot. —

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Newsletter N° 246 – 23 décembre 2024 | Source : Perspective catholique