Eric Bertinat – Il y a une semaine, la presse a relevé qu’un bataillon d’infanterie en cours de répétition avait été invité à réciter le Notre Père après un engagement. Et de rappeler que c’est une prière chrétienne, des fois que la déchristianisation massive de notre société aurait effacée jusqu’à notre mémoire collective cette prière que Jésus lui-même a enseigné à ses disciples.

Cette déchristianisation quasi générale est bien éloignée de la foi qu’affichait nos aïeux des trois premiers cantons qui signèrent le Pacte fondateur du 1er août 1291 et dont le texte commençait par ces mots : Au nom du Seigneur, amen. Les Suisses l’ont perdue sous les coups de butoirs des nombreux adversaires de l’Eglise catholique. A commencer par le clergé lui-même pressé de poser les bases d’une nouvelle religion que pressentait saint Pie X qui n’hésitait pas à parler d’une espèce d’apostasie imminente puis que déplora Paul VI en évoquant une apostasie pratique diffuse .

Dans les faits, ce sont 25’366 sorties d’Eglise qui ont été enregistré en 2018 – un bon quart de plus que les 20’014 enregistrées en 2017. A ces chiffres viennent s’ajouter évidemment une diminution progressive des mariages religieux et des baptêmes.

Dans ce gigantesque marasme spirituel et politique, la lecture de l’ouvrage du cardinal Robert Sarah, Le soir approche et déjà le jour baisse (Edition Fayard, 2019) fait grand bien. Le prélat nous dit sa tristesse de voir que l’Europe a perdu sa noblesse. La crise européenne est essentiellement une crise spirituelle, elle a sa racine dans le refus de la présence de Dieu dans la vie publique. Et de rappeler que : L’entreprise multiculturelle européenne exploite un idéal de charité universelle mal compris. La charité n’est pas un déni de soi. Elle consiste à offrir à l’autre ce que l’on a de meilleur et ce que l’on est. Or ce que l’Europe a de meilleur à offrir au monde, c’est son identité, sa civilisation profondément irriguée de christianisme.

Notre liberté ne donc être que fondée sur notre croyance en Dieu et en son fils Jésus-Christ. Malheureusement, dans les nombreux discours qui seront prononcés ce jour-là, ce courageux rappel tel que l’écrit le cardinal ne trouvera pas place. Nous ne l’avons jamais entendu ces dernières décennies. Nous ne l’entendrons pas cette année malgré une pandémie qui donne pourtant à réfléchir sur notre condition de mortels. Ni dans la bouche d’un politicien, ni dans celle d’un clerc, du moins clairement dit.

Ce 1er août, à cause du coronavirus, plus de la moitié des mairies ont annulé les festivités. Pour les autres, ce sera en petit comité et sur inscription. Il y aura donc moins de monde. Beaucoup resteront chez eux. Mais du Pacte de 1291 à la prière patriotique qui sera tout de même chantée au soir du 1er août, tous réciteront comme malgré eux : Tu m’as dit d’aimer, j’obéis / Mon Dieu protège mon pays.


Lettre d’information N° 19 – 28 juillet 2020 | Source : Perspective catholique