Eric Bertinat – L’abbé Georges de Nantes, né le 13 avril 1924, ordonné prêtre le 27 mars 1948, est mort le 15 février 2010 des suites d’une longue maladie qui l’avait immobilisé dans le silence. Depuis l’an 2000, c’est le frère Bruno qui dirige l’organe mensuel intitulé La Contre-Réforme catholique au XXIe siècle.

Ainsi que le remarque Jean Madiran (toujours lui !) : Sous ce drapeau de la «Contre-Réforme catholique», l’abbé de Nantes laisse une œuvre importante et une école de pensée très active. Sa présence intellectuelle va lui survivre (1).

Jean Madiran relève que l’abbé de Nantes : (…) fut le premier. Non pas le premier à être inquiété ou révolté par ce qui se passait dans l’Eglise. Mais le premier à défendre clairement la nature et l’importance dogmatiques des anomalies et des scandales politiques, moraux, religieux qui s’installaient dans la vie de l’Eglise sans rencontrer d’opposition adéquate et suffisante. (…) Il fut le premier aussi à indiquer une solution : faire appel du Pape au Pape ; demander au Souverain pontife, selon une procédure canonique parfaitement légitime un jugement doctrinal sur le concile pastoral : plus précisément, sur les affirmations, insinuations et implications doctrinales de certains textes pastoraux contesté, Vatican II s’étant déclaré pastoral par distinction explicite d’avec doctrinal. Dans l’immédiat après-concile des années 1966-1970, cette stratégie juridique et théologique rencontra presque unanimement l’incompréhension, voire la raillerie, même parmi les traditionalistes. (…) Pendant trente-quatre ans de confrontation (1966-2000) l’abbé de Nantes aura allégué des «faits» constatés et des «preuves» argumentées, la consigne est restée de ne pas entrer en discussion.

Les rapports de l’abbé de Nantes d’avec les milieux conservateurs ainsi que ceux traditionalistes ont été houleux. Pour le moins. Il y eu une réelle rupture entre son combat et celui de Mgr Lefebvre, deux visions de l’action à mener différentes. Une rupture qui subsiste jusqu’à aujourd’hui et s’entretient à la lecture du mensuel édité par la communauté. Il n’en reste pas moins que la pensée très active de l’abbé de Nantes perdure à travers son œuvre, la communauté des Petits Frères du Sacré-Cœur (fondée en 1958) et la Ligue de Contre-Réforme catholique (fondée en 1970). Une lettre mensuelle paraît avec la régularité d’un métronome. Nous tirons de la dernière parue (N° 246 – août 2023) un extrait d’un texte consacré à l’Assomption. Le voici donc.

Frère Bruno de Jésus-Marie – L’Hymne des premières vêpres de la fête de l’Assomption de Notre-Dame est une merveille, œuvre du pape XII qui a promulgué ce dogme en 1950. Au cœur de l’apogée de son règne, ce Pape qui avait reçu la consécration épiscopale le 13 mai 1917, le jour des apparitions de Notre-Dame de Fatima, paraissait «prédestiné» à accomplir les «petites demandes» de Notre-Dame. Cette poésie le laisse pressentir.

«Dieu veut établir dans le monde la dévotion au Cœur Immaculé de Marie» qui est au cœur de la Sainte-Trinité ! Dieu, un seul Dieu, en trois personnes divines, Père, Fils et Saint-Esprit, Dieu veut établir dans le monde la dévotion au Cœur Immaculé de Marie, une personne humaine que l’hymne chante, «Première» :

Ô Prima, Virgo, prodita,
E Conditoris Spiritu,
Ô Vierge, la première, exhalée
Du souffle du Créateur

Praedestinata Altissimi,
Gestare in alvo Filium
Prédestinée du Très-Haut, à porter dans son sein le Fils.

Ainsi, depuis l’origine, avant la naissance du monde, Elle est là, déjà « xhalée du souffle du Créateur, c’est-à-dire «conçue» par Dieu, non pas par engendrement, ni par création, mais pas «spiration».

Ainsi, la Vierge est présente auprès du Très-Haut, «prédestinée», c’est-à-dire qu’elle existe déjà avant d’avoir reçu cette destination de la parole de l’Ange, prédestinée à porter dans son sein le Fils du Très-Haut, deuxième Personne de la Sainte Trinité.

Depuis longtemps, Dieu pensait à Elle, la concevait «pleine de grâce», habitée du Saint-Esprit, fille immaculée du Très-Haut, mère du Verbe, son Fils.

Tu perpes hostis femina,
Praenuntiata daemonis,
Ô toi, Femme ennemie,
Perpétuelle du démon, annoncée d’avance,

Cette Vierge Immaculée, issue du souffle du Créateur, est l’humiliation de Satan. Elle est la revanche que Dieu remportera par la victoire d’une Femme dont il est écrit qu’Elle lui écrasera la tête :

Ipsa conteret caput tuum,
Oppleris una gratia Intaminata origine.
Seule comblée de grâce,
Immaculée dès l’origine.

Evidemment, pour une telle «offensive», il faut bien que la Vierge ait des forces tout à fait divines. Elle est l’Immaculée Conception, donc inaccessible à l’Adversaire «dès l’origine». Où se situe l’origine de la Vierge Marie? Mystère.


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(1)    Chroniques sous Benoît XVI – tome II (chronique du 20 février 2010 intitulée Présence de l’abbé de Nantes.

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Newsletter N° 147 – 15 août 2023 | Source : Perspective catholique