Clémence Isnard – La nouvelle version de la loi est une révision prévue de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011. L’Assemblée nationale a proposé ses modifications le 15 octobre 2019, puis le projet a été adopté en première lecture par le Sénat, qui a apporté aussi des modifications, par 153 voix contre 143[1]. L’Assemblée nationale l’a encore remanié et l’a adopté en deuxième lecture dans la nuit du 31 juillet 2020.

Il s’agit de 66 pages sur le site de l’Assemblée Nationale, dans lesquelles on apprend que la loi française autorisera des avortements thérapeutiques jusqu’au dernier mois de la grossesse, organisera la vie des enfants sans père en autorisant la procréation médicalement assistée (PMA) pour les couples de femmes et les femmes seules, permettra des expériences d’implantation de cellules humaines dans des embryons animaux, les expériences sur les embryons humains et la revente de ceux-ci à des laboratoires. Désormais, un embryon est un objet que l’on peut céder devant notaire, comme un bien immobilier (article L-2141-6). Le concept de famille est nié. La famille selon l’ancien code civil n’a plus de réalité : un peu partout dans le texte de loi, aux mots « conjoints » et « époux » se sont adjoints les mots « partenaires d’un pacte civil de solidarité ou concubins ». Mais c’est surtout la famille organique qui est niée, la loi établissant le fait qu’un enfant n’est plus le résultat exclusif d’une filiation, mais qu’il est un « projet » indépendant de toute contrainte matrimoniale ou physiologique.

66 pages sur la réification de l’humain et la désacralisation de la transmission de la vie, dans lesquelles le mot « mère » apparaît une fois, le mot « père » pas une seule. Mais dans ces 66 pages, il n’y a pas tout. Il n’y a pas les débats[2], bien sûr, ni les nombreux amendements rejetés ou tombés, il n’y a pas non plus les textes de la loi qui sont restés inchangés, comme la loi sur le « bébé médicament » (la technique du DPI-HLA). Le compte-rendu proposé  ici tient compte de quelques éléments des débats et amendements proposés par les divers députés (tous n’ont pas été lus, il y en a 1766 !), notamment ceux qui ont été rejetés.

TITRE I (PMA)

Le Titre I s’intitule ainsi : « Élargir l’accès aux technologies disponibles sans s’affranchir de nos principes éthiques ». Certains députés ont proposé de supprimer cette formule hypocrite : « sans s’affranchir de nos principes éthiques ». Mme Emmanuelle Ménard a objecté avec un certain humour que : « Ce titre organise le fait qu’un enfant soit privé de son père. Une telle volonté n’est par définition pas éthique. Il convient donc de modifier le titre pour qu’il n’y ait pas de confusion possible » (Amendement n° 36). Le député Thibault Bazin, un de ceux qui se sont le plus prononcés contre cette loi, renchérit qu’en effet, « il semble que les adaptations législatives prévues dans le Titre I s’affranchissent des principes éthiques au fondement de la bioéthique à la française. Ainsi les dispositions prévues par le gouvernement au Titre I peuvent diminuer l’effectivité du respect de ces principes. » (Amendement 164). Il va sans dire que les deux amendements ont été rejetés.

Dans la version précédente du projet de loi, le premier article commençait par cette phrase : « Nul n’a de droit à l’enfant ».

Au vu du grand nombre d’amendements lancés autour de cette phrase, on devine qu’elle a suscité un grand débat, même si presque tous, pour des raisons différentes, étaient d’accord sur le fait que le droit à l’enfant n’existe pas et ne peut pas exister, car l’enfant, comme le dit M. Touraine, rapporteur, « est un sujet de droit et non pas un objet du droit d’un tiers ». Or, l’Assemblée semble s’être partagée entre ceux qui trouvaient nécessaire de le rappeler, et ceux qui, comme M. Touraine, ont préféré supprimer cette phrase, qui selon eux, n’avait pas de raison d’être. Et paradoxalement, une fois retirée cette précision sur l’argument qu’elle est évidente et donc inutile, il plane justement sur les textes qui suivent l’impression qu’en effet avoir un enfant à tout prix est un droit incontestable…

La procréation médicale assistée (PMA)

La PMA est le sujet du chapitre premier, sous le titre : « Permettre aux personnes d’exercer un choix éclairé en matière de procréation dans un cadre maîtrisé ». Comme l’ont fait remarquer en vain plusieurs députés, la nouvelle loi remet en cause le caractère sexué de la reproduction humaine, et organise juridiquement l’absence de père.

  • Jusqu’à présent, le recours à la PMA était accessible aux couples hétérosexuels infertiles, sur indication médicale ; désormais il le sera aux couples de femmes et aux femmes célibataires (amendement adopté n°817, proposé par le Groupe Socialistes et Apparentés).

« Art. L. 2141‑2‑1. – Tout couple formé de deux femmes ou toute femme non mariée répondant aux conditions prévues au § II de l’article L. 2141‑2 a accès à l’assistance médicale à la procréation selon les modalités prévues au présent chapitre. » 

  • Les enfants nés sous ce régime pourront connaître leur véritable père (désigné comme le « donneur », puisque le mot « père » est banni, et/ou leur véritable mère dans le cas d’un don d’ovocytes, à leur majorité. (chapitre III)
  • Jusqu’à présent, il n’était possible que sur « nécessité médicale » de conserver ses propres gamètes en vue d’un projet futur ; la loi l’autorise désormais, et le recueil du consentement du conjoint du donneur est supprimé.
  • Le député Thibault Bazin (Républicains) s’est élevé en vain contre la possibilité de laisser des établissements privés à but lucratif conserver les gamètes (les personnes ayant un « projet parental » doivent prendre en charge le coût de la conservation des gamètes (jusqu’à 10 ans)).
  • La nouvelle loi lève l’interdiction du double don de gamètes extérieurs au couple ou à la femme seule, abolissant ainsi dans ce cas tout lien biologique.
  • Il est à noter que les députés ont beaucoup débattu la question d’accorder aux veuves la PMA post-mortem (avec les gamètes du conjoint décédé), pour finalement rejeter la proposition.
  • La technique du DPI-HLA, appelée « double diagnostic préimplantatoire » (ou encore « bébé médicament »), qui consiste à programmer un enfant dont le fœtus a été sélectionné pour qu’il soit compatible et donneur potentiel d’un aîné porteur d’une maladie génétique rare, avait été remise en question par l’Assemblée nationale à l’automne 2019, puis réintroduite par le Sénat en février[3], et finalement approuvée par les députés le 31 juillet par 48 voix contre 30. Le texte de cette loi, datant de 2004, se trouve à l’article L. 2131-4-1 du code de la santé publique.

Il se dégage de ces mesures une intention de nier l’importance de la filiation biologique dans le « projet parental ». De fait, la loi supprime le critère médical, faisant du médecin, non plus un thérapeute, mais un prestataire. Cette loi de bio-non-éthique fait de l’embryon, c’est-à-dire la plus jeune forme de la personne humaine, un produit de transaction, entre laboratoires, entre particuliers. Un produit que l’on cède devant notaire, que les laboratoires utilisent pour leurs expériences et se revendent, et enfin que l’on détruit quand on n’en a plus besoin. Au détour d’un paragraphe de l’article 1, le terme « qualité » trahit cette réification de la personne humaine en puissance :

« Un couple ou une femme non mariée dont des embryons ont été conservés ne peut bénéficier d’une nouvelle tentative de fécondation in vitro avant le transfert de ceux‑ci, sauf si un problème de qualité affecte ces embryons. » 

Le député Thibault Bazin a déclaré (Amendement n°1304, rejeté) que « L’assistance médicale à la procréation doit rester une réponse à une stérilité médicale et la gestation pour autrui, en vertu notamment du principe d’indisponibilité du corps humain, doit rester prohibée », indiquant par ailleurs, dans son Amendement 168 (rejeté), qu’il vaudrait mieux « développer la recherche sur l’infertilité qui tend à augmenter fortement ». Dans cet amendement 168, il résume les conséquences envisageables de l’article 1, à commencer par le fait qu’il pourrait aboutir à la généralisation de la « PMA généralisée sans sexe y compris pour les couples hétérosexuels ne souffrant d’aucune pathologie mais leur permettant de mieux sélectionner l’enfant à naître par des diagnostics élargis dans le cadre de la PMA ? ». Il revient sur l’expression initiale supprimée, soulevant que la généralisation de la PMA pourrait créer un « droit à l’enfant », justement, et « donc une « chosification » de l’enfant. » Il souligne à son tour que cette mesure ne prend en compte que le désir de l’adulte, et non pas la souffrance possible de l’enfant :

« – Mesure-t-on les risques pour l’enfant d’une institutionnalisation de l’absence du père, donc de l’absence de l’altérité « masculin-féminin » dans la diversité de sa construction psychique ? Avant d’envisager une extension de la PMA, ne devrions-nous pas attendre des études sérieuses en la matière ?

– N’enfreint-on pas la Convention internationale des Droits de l’Enfant qui reconnait à l’enfant « le droit de connaître son père et sa mère et, dans la mesure du possible d’être éduqué par eux » ? N’y aura-t-il pas un risque de poursuites contre l’État de la part des personnes nées par la PMA ?

– Ne crée-t-on pas une inégalité majeure entre des enfants qui auront le droit à un père et une mère, ceux qui auront deux mères, ceux qui auront une mère seule, entre ceux qui auront une ascendance biologique et les autres qui n’en auraient aucune ? »

  1. Bazin pose ensuite deux questions importantes :

– « Et n’ouvrons-nous pas la porte à la GPA ? L’inégalité entre les couples de femmes et les couples d’hommes n’aboutira-t-elle pas inéluctablement à sa légalisation ? »

– « Quel avenir de la relation médicale si les moyens ne sont plus concentrés sur la réponse aux situations pathologiques ?  S’il n’y a plus de critères objectifs, si la médecine ne procède qu’à une évaluation subjective de la souffrance des femmes désireuses d’accueillir un enfant sans pour autant souffrir de pathologies l’en empêchant, ne risque-t-on pas de générer de l’injustice ? »

La député Emmanuelle Ménard (RN) s’est également élevée contre cet article 1 (Amendement 38, rejeté), demandant purement et simplement sa suppression, le qualifiant de « bouleversement anthropologique dont on est incapable de mesurer les conséquences », sur l’argument principal de la protection des droits de l’enfant, que l’on prive ainsi « de son père biologique et de lignée paternelle », organisant « l’effacement de la branche paternelle au mépris de l’intérêt de l’enfant », un préjudice pourtant « reconnu et indemnisé par la Cour de cassation, même lorsque le père est décédé avant la naissance et que l’enfant ne l’a donc jamais connu (Cass. Civ. 2e, 14 décembre 2017, n° 16‑26.687). » Elle rappelle qu’un tel projet de loi « méconnait l’article 7 de la Convention Internationale des droits de l’enfant ratifiée par la France », et renvoie entre autres aux propos du pédopsychiatre Pierre Lévy-Soussan : « Sacrifier scientifiquement le père est une forme ultime de violence faite aux enfants »[4]. Et enfin elle ajoute :

«  Outre le bouleversement anthropologique qui conduit à priver légalement un enfant de père, ce qui signifie en outre le priver de l’expérience de l’altérité et de la parité tout au long de son développement psychologique, il existe un second bouleversement dans le choix fait de reconnaître que c’est l’intention qui fait le parent (cf. argumentaire article 4 filiation). »

Titre II (dons d’organes, de sang, de corps)

Dans cette partie, il s’agit d’organiser et faciliter les dons d’organes, de sang et de corps, et de faciliter l’accès aux résultats d’examens génétiques d’un proche.

–        Les dons d’organes, la transmission des informations génétiques

Le don croisé d’organes prélevés sur personnes vivantes est facilité, y compris chez les personnes mineures. Est également facilité l’accès de la famille aux résultats d’examens génétiques afin de « permettre aux proches de bénéficier de mesures de prévention ou de soins ».

–        Don de sang

Sur l’article 7 bis qui précise que « Les critères de sélection du donneur ne peuvent être fondés sur le sexe du ou des partenaires avec lesquels il aurait entretenu des relations sexuelles » (ajout au 2d alinéa de L. 1211‑6‑1), l’amendement qui proposait de supprimer le délai d’abstinence sexuelle imposé aux homosexuels qui veulent donner leur sang a été rejeté.

–        Les données génétiques

« Art. L. 1130‑6. – I. – Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent chapitre.

« II. – Un arrêté du ministre chargé de la santé pris sur proposition de l’Agence de la biomédecine fixe les critères déterminant les situations médicales justifiant, chez une personne hors d’état d’exprimer sa volonté ou décédée, la réalisation d’un examen de ses caractéristiques génétiques à des fins médicales dans l’intérêt des membres de sa famille potentiellement concernés. »

Titre III (diffusion des nouvelles technologies)

Le titre III (articles 10 à 13) est ainsi formulé : « Appuyer la diffusion des progrès scientifiques et technologiques dans le respect des principes éthiques ».

On peut s’inquiéter de l’usage du verbe « pouvoir », dans l’article 13, indiquant que des dispositifs permettant de modifier l’activité cérébrale (neuro-modulation) et présentant un danger pour la personne humaine, ne sont pas interdits, mais « peuvent » l’être par décret, lequel décret peut aussi bien être levé :

« Art. L. 1151‑4. – Les actes, procédés, techniques, méthodes et équipements ayant pour effet de modifier l’activité cérébrale et présentant un danger grave ou une suspicion de danger grave pour la santé humaine peuvent être interdits par décret, après avis de la Haute Autorité de santé. Toute décision de levée de l’interdiction est prise en la même forme. »

Titre IV (recherche et expérimentation sur les embryons et cellules souches humaines)

Le titre IV (articles 14 à 18) prétend « soutenir une recherche libre et responsable au service de la santé humaine ». Mais tout se joue dans le flou des adjectifs « libre et responsable ». Il s’agit principalement de libéraliser la recherche sur l’embryon et les cellules souches.

L’article 14 traite de la recherche et de l’expérimentation sur l’embryon humain, autorisée si celle-ci est jugée « pertinente ». Mais sur quels critères repose le concept de pertinence scientifique ? 

« Art. L. 2151‑5. – I. – Aucune recherche sur l’embryon humain ne peut être entreprise sans autorisation. Un protocole de recherche conduit sur un embryon humain ne peut être autorisé que si :

« 1° La pertinence scientifique de la recherche est établie ;

« 2° La recherche, fondamentale ou appliquée, s’inscrit dans une finalité médicale ;

« 3° En l’état des connaissances scientifiques, cette recherche ne peut être menée sans recourir à des embryons humains ;

« 4° Le projet et les conditions de mise en œuvre du protocole respectent les principes fondamentaux énoncés aux articles 16 à 16‑8 du code civil, les principes éthiques énoncés au présent titre et ceux énoncés au titre Ier du livre II de la première partie du présent code.

  • La recherche sur les embryons ne peut être menée que sur des embryons issus de la fécondation in vitro « qui ne font plus l’objet d’un projet parental », et se voient proposés à la recherche. Lorsque celle-ci est terminée, il est mis « fin au développement » des embryons.

L’article 14 stipule la suppression des mots « impliquant la personne humaine » dans l’article L1125-3. Cet article, qu’il faut chercher dans la version antérieure de la loi, permet l’utilisation de « produits d’origine humaine ou animale » dans la fabrication de produits médicaux ou cosmétiques. Il mentionne que « les recherches impliquant la personne humaine menées dans le cadre de l’assistance médicale à la procréation » doivent être soumises à autorisation. Cette suppression nous semble hautement significative : la phrase devient beaucoup plus neutre, le concept de « personne humaine » étant dissocié de l’embryon : « Ne peuvent également être mises en œuvre qu’après autorisation expresse de l’autorité compétente mentionnée à l’article L. 1123-12 les recherches (xxx) menées dans le cadre de l’assistance médicale à la procréation mentionnées au V de l’article L. 2151-5 »

Le projet de loi ne modifie pas le régime applicable aux recherches conduites sur l’embryon, mais il dissocie le régime de recherches sur l’embryon de celui sur les cellules souches embryonnaires pluripotentes (cellules prélevées dans un embryon à son tout premier stade de développement et qui peuvent se transformer en tous types de cellules – peau, muscles, cœur…). Pour ces dernières, on passe d’un régime d’autorisation à un régime de déclaration. De ce fait, alors que l’on peut lire (art. 14, p. 38) que l’insertion de cellules souches embryonnaires dans un embryon animal est interdite (interdiction qui fait froid dans le dos parce qu’elle implique que certains peuvent et veulent le faire), en contrepartie les cellules couches pluripotentes induites humaines peuvent être insérées dans un embryon animal, sous le régime de la déclaration : Art.L2151-7 (art. 15, chap III, p. 42).

« Art. L. 2151‑7– I. – On entend par cellules souches pluripotentes induites humaines des cellules qui ne proviennent pas d’un embryon et qui sont capables de se multiplier indéfiniment ainsi que de se différencier en tous les types de cellules qui composent l’organisme.

« II. – Sans préjudice des dispositions de l’article L. 1243‑3 et, le cas échéant, de l’article L. 1121‑1, sont soumis à déclaration auprès de l’Agence de la biomédecine, préalablement à leur mise en œuvre, les protocoles de recherche conduits sur des cellules souches pluripotentes induites humaines ayant pour objet :

« 1° La différenciation de cellules souches pluripotentes induites humaines en gamètes ;

« 2° L’agrégation de cellules souches pluripotentes induites humaines avec des cellules précurseurs de tissus extra‑embryonnaires ;

« 3° Leur insertion dans un embryon animal dans le but de son transfert chez la femelle.

  • L’amendement des sénateurs (n°1509) qui avait proposé d’étendre à 21 jours la durée limite pour la culture in vitro des embryons en vue de la recherche scientifique a été rejeté, et cette durée reste fixée à 14 jours. Cependant une telle proposition indique qu’il existe une volonté d’ouvrir l’expérimentation à un stade plus avancé du développement du fœtus.
  • Les cellules souches embryonnaires peuvent être cédées à des laboratoires autorisés (L. 2151‑9 ; p. 39 et 40).
  • Une bonne chose, tout de même : les expériences visant la transformation des caractères génétiques dans le but de modifier la descendance, ainsi que la modification de l’embryon humain par adjonction de cellules issues d’autres espèces demeurent interdites (Art. 17 / second alinéa de l’article L. 2151‑2). Et par ailleurs l’interdiction de la GPA est réaffirmée.

Pour essayer d’atténuer le problème éthique que pose (pour certains) l’expérimentation sur des embryons ou des cellules souches humaines, Mme Ménard a proposé d’interdire « la dérivation de nouvelle lignées de cellules souches embryonnaires » (Amendement 1332), c’est-à-dire de concentrer les recherches sur des lignées de cellules souches (comme l’ont préconisé le Conseil d’État, l’OPECST, et la mission d’information parlementaire dans leurs rapports préparatoires), ce qui éviterait la destruction d’embryons humains. Sa proposition a été rejetée.

Par ailleurs, elle a fait remarquer (Amendement n°706, rejeté) que : « le fait de différencier les protocoles de recherche applicables à l’embryon humain et aux cellules souches embryonnaires humaines revient à banaliser la recherche sur les lignées de cellules souches embryonnaires et, par voie de conséquence, banaliser davantage la destruction originelle d’embryons, tout en alimentant le besoin de créer des nouvelles lignées de cellules souches embryonnaires humaines. »

Titre V (IVG, changement de sexe d’un enfant)

Sous la belle formule du titre V : « Poursuivre l’amélioration de la qualité et de la sécurité des pratiques du domaine bioéthique » et de son chapitre I : « Poursuivre l’amélioration de la qualité et de la sécurité des pratiques du domaine bioéthique »,  il est question d’améliorer non pas tant les conditions que l’accès à l’interruption volontaire de grossesse.

  • L’article 19, qui renforce l’information de la femme enceinte en matière de pathologie fœtale, trahit l’idéologie eugéniste d’une société qui fait le tri dans ses bébés, n’acceptant que les bébés « parfaits ». Le député Thibault Bazin a relevé le fait que l’information proposée aux femmes enceintes ne leur permet pas de prendre leur décision en toute connaissance de cause. Il a proposé cet ajout visant à un « consentement libre et éclairé », mais son amendement (n°249) a été rejeté :

« Conformément au troisième alinéa de l’article L. 1111‑4 du présent code, la mise en œuvre de ces pratiques fait l’objet d’un consentement libre et éclairé de la femme enceinte qui, préalablement à la réalisation des examens mentionnés aux alinéas suivants, reçoit, sauf opposition de sa part, une information portant, notamment, sur les objectifs, les modalités, les risques, les limites et le caractère non obligatoire de ces examens. » 

  • L’article 20 ouvre la possibilité d’avortements thérapeutiques jusqu’au dernier mois de la grossesse :

« Art. L. 2213‑1. – I. – L’interruption volontaire d’une grossesse peut, à toute époque, être pratiquée si deux médecins membres d’une équipe pluridisciplinaire attestent, après que cette équipe a rendu son avis consultatif, soit que la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la femme, soit qu’il existe une forte probabilité que l’enfant à naître soit atteint d’une affection d’une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic.

  • Cet article propose ensuite, comme si ce choix n’était pas déjà assez difficile pour la femme enceinte, une nouvelle catégorie d’IVG : l’interruption volontaire partielle d’une grossesse multiple en cas de mise en péril de la santé de la femme, des embryons et des fœtus. Or, nous savons tous combien ce « en cas de » peut rapidement être mis de côté, laissant le « confort » prendre le dessus sur le cas de vie ou de mort… Le fait est que les fécondations in vitro provoquent très souvent des grossesses multiples : peut-être faut-il pouvoir rassurer les femmes sur le fait qu’elles pourront se débarrasser du surplus… Cette intervention doit avoir lieu avant la fin de la 12e semaine de grossesse.
  • Enfin le délai de réflexion d’une semaine en cas d’interruption volontaire de grossesse est supprimé. Emmanuelle Ménard s’est opposée à cette suppression, arguant que «  Le choix de la mère attendant un enfant potentiellement atteint d’un handicap doit être libre et sans contrainte. Elle doit donc disposer d’au moins une semaine de réflexion comme c’est le cas dans l’actuel article L. 2213‑1 ». Son amendement (n° 1257) proposant de maintenir cette semaine de réflexion lorsqu’il n’y a pas urgence médicale a été refusé.
  • L’article 21 confirme le fait que la jeune fille mineure peut avorter sans le consentement de ses parents et sans les informer (Art. L. 2213‑2).
  • La clause de conscience des médecins et personnels de santé enjoints de pratiquer un avortement est supprimée. Toutefois un médecin peut refuser si en contrepartie il dirige la demande sur un confrère. (Art. L. 2213‑4.)

La variation inter sexe

Ce chapitre se prolonge avec la question des « Enfants présentant une variation du développement génital » (chapitre Ier bis). Les nouvelles dispositions banalisent le changement de sexe. Elles préconisent la « recherche » du consentement de l’enfant mineur, à condition qu’il soit « apte à exprimer son consentement ». (Et s’il n’est pas apte à le faire, tant pis pour lui ?)

Titres VI et VII

Le titre VI désigne un comité de gouvernance éthique, composé de 45 personnes, dont le panel est décrit à l’article 29, et le titre VII répète la clause réexamen périodique de la loi en ramenant le délai à cinq ans (7 ans dans la loi de 2011).

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Il semble que l’humanité soit devenue comme un enfant gâté qui fait un caprice, prêt à tout pour obtenir tout ce qu’il veut, quand il veut. Plus personne n’est là pour lui donner une bonne fessée (c’est interdit, d’ailleurs) ou le consigner dans sa chambre jusqu’à ce qu’il retrouve calme et raison. Nous voulons tout, en dépit des lois naturelles, en dépit des conséquences, en dépit de nous-mêmes. Nous voulons avoir des rapports sexuels sans avoir d’enfants, et des enfants sans avoir de rapports sexuels. Une femme ne veut pas d’un enfant de plus, pourquoi ne pas s’en débarrasser ? Une femme veut un enfant sans père, pourquoi ne l’obtiendrait-elle pas ? Une autre préfère épouser une femme, mais veut quand même un enfant ? Et pourquoi pas ? Qu’importent les lois naturelles, puisque nous pouvons tout, désormais ?

Il semble que l’humanité rejoue l’antique tragédie de l’Archange de lumière changé en Serpent parce qu’il a voulu être comme Dieu. Vouloir maîtriser la vie et la mort, c’est vouloir être comme Dieu. Mais nul ne maîtrise la vie, sinon Dieu, et celui qui le tente ne fait qu’introduire la mort.

Ces lois iniques ne posent pas seulement des questions de société, ni seulement des questions d’éthique. Elles posent des questions métaphysiques. Comment considérons-nous la personne humaine ? Que faisons-nous des lois de la nature ? Que faisons-nous de la Vie, que faisons-nous avec la Vie ?

Un homme m’a récemment traitée de « catho-facho » (cette insulte a-t-elle un sens ?) parce que je disais que lorsque j’étais enceinte de quelques semaines, je parlais à ce que je considérais déjà comme mon bébé. Un autre, goguenard, m’a rappelé, ignorante que je suis, que ce que j’appelais « bébé » n’était qu’un amas de cellules. Mais j’ai pensé que dans cette logique, je suis moi aussi, il est lui aussi, un amas de cellules. Qu’allons-nous faire d’un tel matérialisme ? Si je ne suis qu’un amas de cellules, me découperez-vous en morceaux et me jetterez-vous à la poubelle, comme ces fœtus dont on voit les petits membres sanglants dans les poubelles de certains hôpitaux, ou considérerez-vous, et pourquoi, que je mérite mieux que cela ? Allons-nous vraiment perdre notre humanité parce que la science nous offre un pouvoir grisant ?

À mes amis catholiques, j’adresse ces quelques citations de ma chère Hildegarde de Bingen, en guise de conclusion à ces lois iniques. Dans toutes ses œuvres, elle affirme que Satan ne veut pas seulement la mort du genre humain mais sa disparition physique ; il s’attaque à la transmission naturelle de la vie, aux lois naturelles de la procréation. Dans le Livre des mérites de la Vie, elle écrit qu’il poursuit l’homme dans sa procréation « à cause de la vieille haine qu’il eut de la fécondité de la femme, il la persécute toujours pour qu’elle n’ait pas d’enfant et il préfère que les hommes se souillent par des pratiques contre nature ». Dans la vision 5 du Livre des Œuvres divines elle évoque le cheval verdâtre de l’Apocalypse qui « désigne le temps durant lequel tout ce qui est conforme à la loi et à la plénitude de la justice de Dieu sera, dans une sorte de lividité excessive, tenu pour rien, durant lequel les hommes diront : « Nous ignorons ce que nous faisons, nos précepteurs eux-mêmes ont oublié leurs préceptes. » Dans ces temps derniers où le bien sera présenté comme le mal et le mal comme le bien, elle annonce que les vices deviendront des vertus, et les pires de tous, selon elle, sont ceux qui portent atteinte à l’origine même de la vie de l’homme, aux lois naturelles liées à la procréation. « Lucifer, écrit-elle, vit qu’il avait le temps de lutter contre les fils des hommes, s’il réussissait à plonger dans le péché les conceptions des hommes ». (…) « C’est pourquoi il dit : « Ma force est dans la conception de l’homme, par-là, l’homme m’appartient ». » Et enfin, dans l’Ordo virtutum, elle fait ainsi parler le Diable : « tu transgresses le commandement que Dieu a donné dans le doux acte d’amour ; tu ne sais donc même pas ce que tu es ». Et en effet, l’humanité ne sait plus qui elle est.

[1] https://www.senat.fr/rap/l10-388/l10-3886.html#:~:text=2131%2D4%2D1%20du%20code,incurable%20au%20moment%20du%20diagnostic%20%3B&text=1418%2D1%20du%20code%20de%20la%20sant%C3%A9%20publique.

[2] http://www.assemblee-nationale.fr/15/cri/2019-2020-extra/20201030.asp

[3] https://www.senat.fr/rap/l10-388/l10-3886.html#:~:text=2131%2D4%2D1%20du%20code,incurable%20au%20moment%20du%20diagnostic%20%3B&text=1418%2D1%20du%20code%20de%20la%20sant%C3%A9%20publique.

[4] https ://www.lepoint.fr/sacrifier-scientifiquement-le-pere-est-une-forme-ultime-de-violence-faite-aux-enfants-03‑07‑2017‑2140075_19.php


Lettre d’information N° 21 –  | Source : Perspective catholique


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