Christian Bless – On nous demande : « Que peut attendre un catholique de l’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis ? »
De prime abord, étant modérément démocrate et ayant une aversion profonde pour la vulgarité mensongère du cirque électoral, rejetant les divisions qu’impose et approfondit le système des partis politiques, nous serions tentés de ne rien attendre de ces violentes alternances qui épuisent nos patries saccagées par les idéologies nihilistes et les ambitions personnelles de personnages le plus souvent insignifiants. Face à cet affaissement du politique, l’on est tenté de se retirer et de reprendre la lecture de Les deux démocraties de Jean Madiran, ou ses pages intitulées La gauche et la droite, ou se plonger dans Raison d’être de C-F Ramuz. Sans doute, pourrez-vous préférer relire Que faut-il dire aux hommes d’André Charlier ou La réforme politique d’ Henri Charlier? Mais, en attendant, cet affaissement de la chose public s’impose à nous, nous enserre, et il faudra bien tenter de répondre à la question qui nous est posée.
Sans illusion cependant. Nos maux sont trop profonds et plongent leurs racines dans un passé déjà lointain. La durée d’un mandat électoral dans nos « démocraties », manipulées par des médias aux mains d’intérêts idéologiques puissants, constitue déjà un obstacle fondamental à toute politique cohérente qui, pour se développer, nécessite un horizon de temps qui dépasse les quatre à cinq années accordées à un élu. D’autant plus, que, peu après le début de ces mandats, l’élu, et son parti, pensent et agissent déjà dans la perspective de la prochaine échéance électorale sans considération pour les nécessités vitales du pays mais en fonction du seul intérêt de s’accrocher à leurs bribes de pouvoir.
Nous nous trouvons donc face à deux maux fondamentaux de notre abaissement intellectuel, moral et politique : le régime des partis qui institutionalise la division des sociétés et les incessantes ruptures électorales qui consument l’énergie vitale de nos pays. Elles rendent illusoire toute Réforme intellectuelle et morale en profondeur, telle que la souhaitait Jean Madiran. Cependant, au milieu de cette dissolution de nos sociétés, qui semble inexorable, il est des temps d’arrêts, des ralentissements dans le mouvement de glissement qui permettent peut-être une action, au moins une réflexion, en faveur d’un retour au réel et à la nature des choses. La récente élection américaine nous offre, peut-être, un temps de répit ? Les réactions atterrées et les visages défaits des politicards et des histrions qui plastronnent dans les médias subventionnés pourraient en être un signe réconfortant ?
Que demandons-nous à notre ordre politique et social et à ceux qui en ont la charge ? Le respect des tâches régaliennes de l’État et de l’ordre naturel des choses. Contenir l’État à l’intérieur des tâches régaliennes et, si nécessaire, le refouler graduellement hors des domaines où le cancer législatif et démagogique l’a fait déborder, appliquer le principe de subsidiarité et rapprocher la décision politique du contrôle populaire. Limiter énergiquement l’intervention étatique à la défense des frontières, à la sécurité extérieure, à l’ordre intérieur afin de permettre aux habitants de la Cité de vivre librement et en sécurité, assurer que la justice soit rendue efficacement à tous.
Cela implique le retour à la maîtrise de nos frontières et à leur défense, de décider de nos accords internationaux en fonction de nos intérêts d’abord, en s’assurant que notre souveraineté soit respectée, et, si nécessaire, sortir des accords qui nous sont préjudiciables. Il est urgent de bloquer la croissance cancérigène de l’État et des administrations en les désengageant des charges non essentielles qui, par subsidiarité, peuvent être confiées à l’initiative privée sans affaiblir l’autorité de l’État qui ne peut être soumis aux puissances d’argent. Responsabiliser les citoyens en les dégageant d’un système paternaliste d’assistanat et ainsi leur rendre une liberté d’action et une dignité propre. Empêcher tous déficits et toutes dettes, dépenser ce que l’on a sans hypothéquer les générations à venir. Cela impliquera une gestion prudente et stricte des dépenses, diminuera le risque des dépenses démagogiques et permettra une réduction graduelle de la charge fiscale afin de rendre le pouvoir financier aux personnes et aux sociétés. Diminuer progressivement la soi-disant « aide à l’étranger » qui se révèle le plus souvent être un gaspillage qui ne profite pas au bénéficiaire allégué, dans des projets sans avenir, et qui ne fait que de flatter l’amour propre des autorités fédérales et de justifier des voyages coûteux et inutiles.
Entamer un processus d’endiguement de l’inflation législative et réglementaire qui paralyse progressivement l’initiative individuelle et sclérose nos sociétés en les noyant dans un flot de contraintes et de paperasserie stérilisantes et coûteuses. Imposer un moratoire législatif et consacrer l’énergie ainsi libérée à un élagage du carcan législatif et réglementaire qui ne fait que de nourrir une caste qui vit de cette diarrhée. Procéder à une vaste révision des politiques passée et écarter les idéologues qui nous ont embarqués dans des projets aberrants qui nous coûtent les yeux de la tête, entre autres : l’abandon du recours à l’énergie nucléaire, des politiques dites « climatiques » sans aucun rapport avec la réalité, la gestion totalitaire et absurde de la manipulation pandémique, l’achat probablement scandaleux d’avions de combat, les circonstances dans lesquelles le Conseil fédéral a engouffré le pays dans une politique de sanctions, l’alignement sur les politiques des institutions internationales telles l’UE, l’OTAN, l’ONU, notre présence au Conseil de sécurité …
Pour cela, il faudra trouver des hommes politiques, des hommes d’État, qui auront comme première préoccupation de défendre les intérêts concrets des Confédérés et non de se mettre à la remorque des idéologies du jour et des puissances étrangères qui ne sont ni désintéressées ni amicales. Il faudra restaurer pleinement notre neutralité protectrice bradée sous la pression étrangère par une classe politicienne et bureaucratique inepte. Travailler à restaurer notre souveraineté économique et financière en trouvant des voies pour nous soustraire au chantage du « swift » et de la devise américaine qui est un instrument d’asservissement.
Enfin, et c’est sans doute par là qu’il faudrait débuter, il importe plus que tout, car c’est là le fondement, de restaurer une image de la famille conforme à la nature humaine et débarrasser notre cadre intellectuel et législatif de la dictature des inversions et des perversions minoritaires. Défendre et illustrer le rôle de la famille conforme à la nature des choses, à la loi naturelle. Honorer les mères de famille et leur rôle irremplaçable, honorer leurs sacrifices et leur don dans la maternité, qui fait toute leur noblesse parfois douloureuse, et assure la continuité de nos sociétés, honorer ce don de la vie au détriment de l’abominable meurtre de l’enfant à naître qui est une régression intellectuelle et morale sans précédent. Rendre aux familles leur autorité et leur rôle irremplaçable dans l’éducation et la scolarisation de leurs enfants. Notamment, en désétatisant l’enseignement, l’État n’ayant aucune compétence naturelle en matière d’enseignement, seulement un devoir subsidiaire, et en permettant aux parents d’exercer librement, sans être pénalisés financièrement, leur droit naturel de choisir l’école de leurs enfants, en prolongement de l’éducation familiale.
Ici, le lecteur nous arrête, nous reprochant de n’avoir pas répondu à la question posée. Cependant, selon les informations glanées, il semble bien qu’au travers de nombreuses déclarations, le nouveau Président des États-Unis s’apprête à mettre en place des politiques qui correspondent à l’esprit de ce qui précède. Dans son sillage, chaque nation selon son génie propre, libérée du joug égalitaire et stérilisant du globalisme destructeur, nous pourrions envisager d’entamer un parcours similaire à long terme. Nous avons une confiance très modérée dans les promesses électorales, pour dire le moins, mais, à ce jour, laissons-lui le bénéfice du doute. Une réorientation de la politique américaine dans ce sens ferait sans doute souffler sur notre continent un vent nouveau qui nous permettrait d’envisager de nous débarrasser d’une classe politique et médiatique qui a failli et de travailler, avec patience, à une Réforme intellectuelle et morale selon les enseignements ignorés le plus souvent, et même méprisés, de Charles Péguy, Henri et André Charlier, Jean Madiran, Louis Salleron, Henri Pourrat, C-F Ramuz, le RP Calmel et quelques autres.
___________________________________________________________________________________
Newsletter N° 243 – 13 septembre 2024 | Source : Perspective catholique