Eric Bertinat – Le 8 janvier dernier Jean-Marie Le Pen nous a quittés. Le petit monde politico-médiatique français qui ne l’a jamais ménagé n’a pu faire l’impasse sur les 60 ans de sa longue carrière politique. Il fut l’objet d’un incroyable mépris et d’une longue exécration de l’ensemble de ce microcosme. Malheureusement pour eux, le décès du président du Front national a coïncidé avec le scandale insupportable qui s’est passé entre 1980 et 2010, en Angleterre: des milliers de jeunes filles ont été victimes de viols perpétrés par des gangs d’Indo-Pakistanais. Ces événements d’une gravité sans précédent ont été étouffés par ce même petit monde politico-médiatique au nom du vivre-ensemble.
Jean-Marie Le Pen a incarné la figure la plus controversée de la scène politique française. Pour ceux qui ont vécu ces années et partagé son analyse sur la politique française, et plus particulièrement sur l’immigration, la vie devenait rapidement une survie, qu’elle soit professionnelle ou politique. Malgré sa longue absence ces dernières années, son décès a été commenté longuement dans les médias. Pour de nombreux journalistes, cet exercice mémoriel s’est révélé délicat ; pourtant, certains ont fini par admettre que Le Pen avait raison concernant l’immigration et que sa vision, longtemps vilipendée par les bien-pensants, trouve aujourd’hui un écho dans notre quotidien. Une repentance molle qui fait étrangement écho aux vents mauvais qui soufflent sur leurs confrères britanniques. Comme le souligne Mathieu Bock-Coté dans Le Figaro du 3 janvier : Les violences issues de la diversité sont plutôt passées sous silence, ou même carrément niées, d’autant qu’elles révèlent que la sécurité et la liberté des femmes sont le prix à payer pour la poursuite de l’aventure multiculturelle.

En Suisse, pas mieux !
En Europe, le combat des «bien-pensants» a été sans pitié contre toute critique d’une immigration incontrôlée. Cette traque acharnée s’est également déroulée en Suisse. Pensez à James Schwarzenbach (1911-1994) ! Né dans la haute bourgeoisie protestante de Zurich et formé comme historien, il a embrassé, jeune homme, le catholicisme et s’est investi dans l’édition. Son anticommunisme ardent et sa défense d’une Suisse indépendante ont jalonné son parcours jusqu’à son élection au Conseil national en 1967, sous l’étiquette de l’Action nationale. Il s’est rapidement fait remarquer par ses discours sur l’immigration massive qu’il voyait comme un outil pour des entrepreneurs avares de main-d’œuvre bon marché. Un patronat qui mis sous influence la droite helvétique, elle-même rapidement sous contrôle par la gauche. Son nom est surtout lié à l’initiative populaire qu’il a lancée en 1970 pour restreindre drastiquement l’immigration en Suisse. Malgré une campagne d’une violence inouïe menée par la classe politique, les médias, les secteurs économiques et culturels ainsi que par d’importantes institutions publiques (PTT, CFF, etc.), cette initiative a été rejetée de justesse par le peuple.
Ainsi que le remarque Dominik Landwehr (1) : Si le résultat de la votation du 7 juin 1970 en surprit plus d’un, le débat n’était pourtant pas nouveau: depuis l’industrialisation datant du milieu du XIXe siècle, la Suisse avait besoin de main-d’œuvre provenant de l’étranger afin de faire face à l’essor économique et aux besoins croissants de l’industrie, du bâtiment et des travaux publics, notamment pour la construction des lignes ferroviaires et des tunnels alpins.
Sur les plateaux télévisés, James Schwartzenbach se démarquait néanmoins par son exemplarité et sa courtoisie lors de chacune de ses interventions. Il s’exprimait avec clarté en français et avançait des arguments précis qui étaient systématiquement qualifiés de racistes et xénophobes. Dans son livre Jagt sie weg, le journaliste italien Concetto Vecchio décrit l’atmosphère qui régnait dans la vie familiale de ses parents, alors qu’ils travaillaient en Suisse, mettant en garde leurs enfants avec cette menace : «Sinon Schwarzenbach viendra…»

Un programme qui n’a pas pris une ride
Quoi de plus parlant que de se pencher sur son programme de 1964 ? Le parti dirigé par M. Schwarzenbach présente les bases d’une politique dont la pertinence n’a jamais été aussi évidente et qui aujourd’hui encore est très proche de l’UDC :
1. En tant que républicains, nous sommes un parti historique, profondément ancré dans la foi chrétienne révélée.
2. À une époque où l’humanité est confrontée à la menace du développement débridé de la technologie et au déclin des valeurs spirituelles, tout comme notre État est mis en péril par l’internationalisme politique, économique et idéologique, notre parti s’engage à respecter l’article 2 de notre Constitution fédérale…
3. Nous Républicains exigeons un retour immédiat et inconditionnel de la Suisse aux fondements éprouvés de notre politique extérieure : la neutralité permanente et armée. Par conséquent, nous demandons l’abandon de toute adhésion au Marché commun ainsi qu’aux organisations politiques des Nations Unies, ainsi que toute participation de la Suisse à des pactes, traités ou conventions qui seraient incompatibles avec notre neutralité.


La presse s’opposait fermement à l’idée que l’immigration massive qui se dessinait alors puisse constituer une menace pour l’identité suisse, ainsi que pour sa culture, ses traditions et ses valeurs suisses. À cette époque, seuls les bienfaits de la multiculturalité était indéniablement reconnue dans les colonnes des journaux suisses. Celui qui tenait un discours autre était un homme à abattre, celui qu’il fallait faire taire pour éliminer toute critique d’une politique migratoire illimitée. À ce jour, vous ne trouverez aucune trace de discours ou d’écrits de Schwarzenbach sur internet, hormis de nombreuses critiques le concernant. Seules quelques émissions demeurent accessibles, comme celle diffusée en direct en octobre 1973, où Gaston Nicole et Claude Torracinta dialoguent avec James Schwarzenbach tout en laissant transparaître leur profonde antipathie envers lui.
L’étude de l’immigration en Suisse illustre bien les transformations des politiques migratoires européennes. Les travailleurs saisonniers italiens ont servi de révélateur des tensions entre les besoins économiques et les préoccupations sociales. L’adoption des accords bilatéraux a marqué un tournant, mais les débats sur l’identité nationale et la place de l’islam dans la société suisse ont rapidement pris le relais. Cette évolution témoigne de la complexité des enjeux migratoires, qui dépassent largement les questions économiques.
Tout comme Jean-Marie Le Pen, James Schwarzenbach fut détesté pour son opposition à une immigration idéologique, une immigration non de travail mais de peuplement dès que le regroupement familial fut autorisé, une politique défendue âprement par la gauche et soutenu lâchement par la droite. Tout comme Jean-Marie Le Pen, James Schwarzenbach fut détesté pour son discours dénonçant avec lucidité le recours sans frein aux travailleurs étrangers, à l’époque essentiellement italiens, portugais et espagnols, mais qui n’étaient que le prélude au mondialisme. —

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Newsletter N° 248 – 22 janvier 2025 | Source : Perspective catholique